L’escalier, à la rencontre de Tirésias.

Il est temps de passer à un autre stade, et si cela vous intéresse, je vais vous raconter une histoire d’escalier. D’escalier divin, ou humain.
Comme tout escalier, il y a des marches. Et la première est celle du bas. Vous visualisez ? Celle du bas est celle du sol, celle qui ne dépasse pas, celle qui est avant de lever le pied pour monter l’escalier. Cette marche invisible est comme nous : elle est inconsciente. Elle se trouve en bas de l’escalier, et si on ne décide pas de prendre l’escalier, elle ne sert à rien. Inconsciente comme notre incompétence.
Notre incompétence est inconsciente jusqu’au moment où on se rend compte qu’il y a un escalier. Donc des marches qu’on peut monter (ou descendre si cela vous amuse, moi j’aime mieux prendre les pentes en montant, le ciel est vers le haut, mais en bas, la terre nous accueille aussi avec sa bienveillance). Bref, vous n’avez pas conscience de votre incompétence avant d’avoir vu l’escalier.
Parfois, c’est un Autre qui vous fait prendre conscience. Ou bien vous vous cassez la figure dedans. Cette incompétence inconsciente devient consciente. Vous êtes sur la première marche.
La marche d’être conscient de son incompétence. Et là, c’est le drame, soit vous redescendez vite, mais, trop tard, vous avez la conscience, et la conscience ne revient jamais comme avant. Votre incompétence est là, assise sur la marche, comme un gros crapaud. J’aime bien les crapauds, le nôtre à la maison s’appelle Tirésias. Il se promène entre les rosiers et les hortensias, on le croise souvent le soir. Par chance Tirésias ne monte qu’une seule marche, celle de la terrasse…
Donc face à cette incompétence qui vous fait face, ne pouvant redescendre, vous pouvez soit rester là où vous êtes, et accepter que vous ne « savez pas » (ce qui est déjà un immense savoir que de savoir qu’on ne sait pas, et surtout de l’accepter), ou bien vous pouvez vous dire que « vous ne savez pas » et décider de découvrir et d’apprendre ce que vous ne savez pas. Apprendre, cela veut dire, prendre avec soi. C’est vrai que Tirésias est très bien où il est, je ne vais pas le prendre avec moi, merci. Lui fait partie des vivants, et il est libre, libre de m’apprendre à l’être aussi…
Quand j’ai appris ce que je ne savais pas, je passe Tirésias et monte sur la marche suivante. Je suis consciemment compétent. Quelle joie ! Je sais que je sais, c’est merveilleux ! Je parle anglais, je sais conduire une voiture, je sais mettre en marche mon ordinateur et mettre des croix dans des cases ! Je sais ! Je suis un génie !
Un génie de courte durée, car plus je sais, moins je sais. Je sais faire sans savoir comment je fais. Magique et inquiétant. Je deviens inconsciemment compétent. Bien sûr que je sais conduire, que je sais des milliers de choses, mais je ne sais plus quoi, ni comment.
L’escalier serait-il injuste ? J’ai pris conscience de mon incompétence, j’ai appris, je suis devenu compétent, et maintenant ? Quid ? Que faire de mes savoirs invisibles ?
Vous pouvez continuer votre escalier sans fin, comme une spirale vertueuse qui monte toujours plus haut. Sans ne jamais finir d’apprendre. Une vis sans fin (une vertu donc !).
Vous vous sentez comme Sisyphe qui n’arrêtera jamais ? Oui et non, car l’escalier n’est pas une montagne, ce sont des marches, et régulièrement, il y a des paliers. Vous pouvez sortir de cet escalier pour entrer dans une pièce de votre choix. Car depuis la rencontre avec Tirésias vous êtes libre…
Et la bonne nouvelle, c’est que sur chaque palier, se trouvent d’autres gens, qui sont au bas de leur escalier, et qui ne savent pas qu’ils ne savent pas.
Vous voyez où je veux en venir ? Vous savez, eux pas… Alors que pouvez-vous faire de tous ces savoirs inconscients qui vous habitent ? Vous devinez ?
Les partager. La cinquième marche de l’escalier est celle du partage. Je vous invite à essayer. Vous n’imaginez même pas tout ce que vous savez ! Beaucoup plus que vous ne croyez. Devenez l’Autre, à la rencontre de Tirésias…

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